Terroirs & territoires: Hautes-Pyrénées, révélations bio
À partir du 27/08/2020
Les Hautes-Pyrénées, avec Lourdes ville sanctuaire des apparitions et des miracles à la croisée des chemins de Compostelle, attirent le monde entier : Culturesbio a pris son bâton de pèlerin pour découvrir les voies de l’agriculture biologique et ses aventures humaines. Entre solitudes rudes mais choisies et dynamiques collectives, de belles rencontres, des paysages divins, ainsi sont-ils…
Par Pascale Solana
« Bien sûr la terre est basse, mais quel métier n’a pas ses difficultés ? Chaque jour, je récolte mes légumes devant une carte postale ! », s’exclame Sylvain Doucey, le cuistot originaire des Alpes devenu un maraîcher bio des Hautes-Pyrénées.
À l’horizon, la muraille montagneuse, avec ses pointes enneigées et son pic du Midi, cisaille le ciel. Au fur et à mesure qu’on se rapproche, elle grandit, imposante, puis vous aspire vers les vallées profondes et encaissées. La géographie a dessiné l’agriculture et les relations entre les hommes. Autour de Lannemezan, Tarbes, jusqu’aux portes de Lourdes, la plaine, comme souvent, est colonisée par les monocultures céréalières. En allant vers l’Espagne, dans les montagnes qui occupent une grande partie du département, les fermes plus polyvalentes s’égrènent, de moins en moins nombreuses avec l’altitude.
Dès qu’on prend de l’altitude, l’autonomie alimentaire et l’approvisionnement de proximité chers à l’élevage biologique sont difficiles et coûteux. Il y a peu de filières pour valoriser les viandes bio comme le lait bio jusqu’au très récent démarrage de la coopérative de collecte Biolait, sociétaire par ailleurs de Biocoop.
« Entre agriculture intensive et forte concurrence du produit de montagne, le bio n’est pas toujours vu comme une plus-value. La vente directe est financièrement bien valorisée et les gens ne font pas toujours la différence entre bio, local, montagne », explique Fanny Dunan, coordinatrice au GAB65 (Groupement d’agriculture biologique). Et pourtant…
Libres biquettes
À la ferme Bayardous, Georges Bidart et Alexia Bouche conjuguent les trois approches. Elle, qui s’est formée pour être bergère, lui, le fou de nature qui court la montagne depuis l’enfance, ont uni leur passion il y a 15 ans pour élever une centaine de chèvres dans ce Val d’Azun aux panoramas somptueux. D’avril à novembre, leurs « biquettes » broutent où l’instinct les guide. Chaque soir, Georges ou Alexia montent les rechercher dans les estives avec les chiens pour les traire à la chèvrerie. Comment imaginez-vous les fromages du lait de ces bêtes ? Elles « qui n’ont jamais connu l’ensilage* même s’il augmente la production », précise Georges, exigeant pour ses caprins sportifs nourris d’herbes, de fleurs et de liberté. Leur lait est d’abord chauffé dans un chaudron en cuivre, à basse température pour l’intérêt nutritionnel et aromatique, puis le caillé est moulé sans mécanisation, à l’ancienne : « Pas au répartiteur qui traite le caillé en peu de temps, mais à la louche, délicatement au fil des différentes qualités de la traite », ajoute le chevrier. Ne leur parlez pas de ces fromages de laiterie industrielle régionale dont l’étiquette vante un air local et montagnard. Mais dites-leur qu’en choisissant la tomme de la ferme de Bayardous aux magasins Biocoop de Lourdes ou de Tarbes, vous pressentiez la passion.
Dynamiques de groupes
Si le relief favorise l’isolement, le collectif se développe aussi sur ce territoire et Biocoop y participe à différents niveaux. Biocoop restauration a développé des partenariats avec des groupes de producteurs à travers Restobio 65, encore une coopérative (une Scic, société coopérative d’intérêt collectif). Ainsi ils peuvent fournir les cantines locales avec une offre complète et être sur des marchés généralement dominés par de grandes entreprises de restauration collective peu à l’aise avec la bio locale.
Encouragés par les trois magasins de Lourdes et de Tarbes, « des maraîchers bio, une vingtaine actuellement, ont réussi une mise en marché commune grâce à un outil en ligne mis au point par l’un d’entre nous, ancien informaticien, explique Sylvian Doucey. Cette planification nous permet tous d’exister, petits, gros, avec des façons de travailler très variées. »
La famille Dusserm (de gauche à droite, les parents Gérard et Odette et les deux fils Sylvain et Luc) a orienté son village vacances créé il y'a 30 ans, vers le bien être et l'écologie
« On retrouve Biocoop dans tous les projets bio, constate Fany Dunant. Dès le début, les magasins se positionnent comme débouché potentiel. Si le produit est singulier ou un peu plus cher, ils le portent. C’est capital pour aider la production locale ; toujours partants pour accompagner, jusque dans des projets d’accessibilité alimentaire. » Ceux de Lourdes et de Tarbes avec le GAB65 et le Secours populaire proposent tous les mois à une trentaine de familles des paniers bio à prix réduits, des ateliers cuisine…
Sylvian Doucey est fou de légumes anciens, surtout les tomates. Sa passion de jardinier amateur, lui qui était chef dans la restauration, il en a fait son métier. À 56 ans, il suit une formation de maraîchage bio pour se perfectionner et se lance en 2014, à Tarasteix au nord de Tarbes… Au fil des rangées soignées, Sylvian vante la broute, chou gascon (ci-contre), se pâme devant le chou-fleur violet du Gard, est intarissable sur ses 65 variétés de tomates. « Aucune hybride, pas de chambre froide. Pour préserver le goût ». Il n’en a pas vraiment besoin car il a pensé son système à mesure d’homme, sur 1,5 ha. Il récolte au fur et à mesure et vend tout. Certains clients du magasin Biocoop de Lourdes ou du marché vont jusqu’à lui réserver des petits plants ou des légumes… Légumes, dont il parle comme de ses petits protégés.
Retrouvez en intégralité notre rubrique Terroir et Territoire, en plein cœur des Hautes-Pyrénées, dans le n°111 de CULTURESBIO, le magazine de Biocoop, distribué gratuitement dans les magasins du réseau, dans la limite des stocks disponibles, ou à télécharger sur le site de Biocoop.